Les limites de l’entente sino-américaine

 

Frédéric Koller

 

Le président américain Barack Obama et son homologue chinois Xi Jinping se rencontrent en Californie, pour tenter d’instaurer un lien personnel de confiance

 

Dans l’intérêt de la paix mondiale, il vaudrait mieux que ces deux-là s’entendent bien. Ces deux-là? D’abord, il y a Barack Obama, élu pour un second mandat à la tête de la première puissance mondiale, ébranlée certes, mais qui ne doute pas de sa destinée à rayonner sur l’univers. Ensuite, il y a Xi Jinping, le chef de la Chine désigné par un parti «communiste» convaincu de mener à bien sa mission de résurrection nationale. Désormais, la deuxième économie mondiale ne veut plus traiter avec les Etats-Unis que sur un pied d’égalité, dans la nostalgie d’avoir été, en d’autres temps, le centre du monde – du moins le croyait-elle.

 

Pour s’assurer que le courant passe, l’hôte américain a choisi une retraite dans le désert californien, loin du brouhaha de Washington et de ses lobbyistes de tout poil. Durant deux jours, avec six heures d’entretiens au menu, les deux hommes auront pour tâche principale d’instaurer un minimum de confiance, histoire de ne pas voir déraper une relation complexe et forcément multiforme à l’ère de la globalisation.

 

En réalité, l’état actuel des rapports entre Washington et Pékin est plutôt bon. Il est abusif de parler de guerre froide, comme le font les faucons de chaque camp pour nourrir leur budget militaire respectif. Rien de comparable avec l’ère de la confrontation permanente de l’époque soviétique. La conversion de la Chine au capitalisme s’est traduite par une interdépendance économique qui est désormais le meilleur garant de la paix. Pékin n’a aucun intérêt à entrer en conflit avec le client le plus friand de ses produits d’exportation. Et Washington devra y réfléchir à deux fois avant de s’en prendre à son banquier le plus dévoué.

 

Mais la raison économique ne dicte pas tout. La grande difficulté, la voici: l’ajustement des forces entre une puissance jusqu’ici dominante – les Etats-Unis – et l’affirmation d’une puissance émergente – la Chine. Ce rééquilibrage ne peut se faire sans frottements. Les erreurs de calcul sur les intentions de son concurrent ont mené aux pires désastres, comme le démontre assez le XXe siècle. Les deux géants ne sont pas condamnés à entrer en collision, mais les risques de tension vont s’intensifier, surtout dans le Pacifique et le voisinage de la Chine. Il serait tout aussi absurde d’ignorer le clivage idéologique persistant, entre les hérauts d’un capitalisme libéral et démocratique et les tenants d’un capitalisme autoritaire. Sur ce dernier point, entre Xi et Obama, aucun compromis n’est possible.