Gafa contre Daech

 

de Michel Lévy-Provençal

 

Face à une menace internationale et décentralisée comme Daech, on sait désormais que l'efficacité des armées conventionnelles est relative. Les groupes terroristes utilisent Internet et les services des Gafa (Google, Amazon, Facebook, Apple) comme terrain d'opération et comme plate-forme de recrutement. Par exemple, les algorithmes de Facebook aident des djihadistes à cibler de potentielles recrues, comme le montre parfaitement Anne Erelle dans son témoignage « Dans la peau d'une djihadiste ».

 

Il est par conséquent cohérent de s'interroger sur le rôle que ces géants du Net pourraient avoir dans la lutte contre le terrorisme international. D'autant que ces mêmes acteurs ont prouvé, en une décennie seulement, qu'ils avaient la capacité de transformer de nombreux secteurs : infrastructures, culture, communication, marketing et, plus récemment, santé, transports, éducationPourquoi pas celui de la sécurité intérieure, voire extérieure ? Dotés de technologies de pointe, les Gafa ne seraient-ils pas la meilleure arme contre une menace comme Daech ? Cela leur permettrait de poursuivre leur mission de transformation du monde, et, évidemment, de préempter le marché de la cybersécurité, en disruptant l'ancien modèle des armées étatiques.

 

Un tel scénario est il réaliste ? D'après Guy-Philippe Goldstein (consultant expert en cybersécurité, auteur de « Babel Minute Zéro », Gallimard), c'est le risque d'une dégradation de leur image qui freine les Gafa aujourd'hui. En revanche, les start-up qui s'emparent du sujet fleurissent, à l'instar de l'américain Palantir, dont le but est d'analyser de grandes quantités de données pour  « aider les institutions à protéger la liberté », ou de l'israélien Satellogic, qui a pour ambition de déployer un réseau de nanosatellites civils, dont l'efficacité est comparable à celle des meilleurs dispositifs militaires.

 

Tout indique que, dans les prochaines années, de nombreuses entreprises « disrupteront » le modèle militaire traditionnel en facilitant l'accès à des outils de surveillance, d'analyse, de propagande et d'action, basés sur le Big Data, l'intelligence artificielle, la robotique, les drones, les nanotechnologies et les biotechnologies.

 

Michel Lévy-Provençal