exemple américain

 

29.01.2013

 

Une semaine après son discours d'"inauguration", marqué à gauche, Barack Obama devait prononcer, mardi 29 janvier, une allocution relançant une promesse jamais réalisée pendant son premier mandat : la réforme des lois sur l'immigration. Son ambition ? Permettre la régularisation des sans-papiers, dont le nombre est estimé à quelque 11 millions.

 

Mais la nouveauté n'est pas : elle réside dans la spectaculaire volte-face des républicains sur une question qui, parmi d'autres, a coûté la victoire à leur candidat en novembre 2012, en lui aliénant le vote "latino". Pour séduire la droite de son parti, Mitt Romney refusait d'envisager une amnistie et promettait de rendre la vie impossible aux illégaux.

 

Quatre sénateurs républicains, dont l'ancien présidentiable John McCain, viennent de signer, avec quatre de leurs collègues démocrates, un projet de réforme global traçant un chemin vers la régularisation des sans-papiers, voire leur naturalisation. Pareille perspective serait conditionnée à une sécurisation totale des frontières, à la mise en place d'un contrôle systématique des entrées et sorties, et même des embauches. Pour les étudiants enfants de sans-papiers, les travailleurs agricoles et les hauts diplômés, les procédures seraient accélérées.

 

Le donnant-donnantsécurisation contre régularisationest probablement irréaliste. Tout comme l'idée de rendre étanches 3 000 kilomètres de frontières désertiques. Dans son propre projet, Barack Obama ne devrait d'ailleurs pas retenir cette conditionnalité. Et il est tout sauf certain que le président parvienne aisément à faire adopter un tel texte par la Chambre des représentants : dominée par les plus radicaux des républicains, l'idée de régularisation massive des sans-papiers y fait souvent figure d'épouvantail.

 

Il reste que la nouvelle position des sénateurs républicains mérite d'être saluée. Sur le fond, elle représente un tournant pragmatique, conforme à l'opinion modérée de la majorité des Américains sur ce sujet si fortement lié à leur identité. Sur le plan politique, elle constitue un défi au Tea Party. Après le compromis accepté, en décembre, sur le plafond de la dette, c'est un nouveau signe du recentrage du Parti républicain.

 

La France n'est pas les Etats-Unis. Même si l'Hexagone a longtemps joué un rôle comparable, en Europe, de terre de refuge et d'espoir pour les migrants. Mais le tournant réaliste des républicains devrait faire réfléchir les responsables politiques français. "Tout le monde s'accorde à dire qu'il n'est pas bon que ces gens se cachent dans l'ombre", a déclaré le sénateur républicain McCain. "Nous avons profité trop longtemps de gens pour tondre nos pelouses, (...) et même garder nos enfants, sans leur accorder le moindre des avantages qui font que ce pays est formidable."

 

Pareil langage a peu de chances d'être entendu en France, la crise et le chômage ont renforcé l'hostilité à l'égard des immigrés. Et fait oublier qu'une vraie politique d'immigration ne devrait pas être seulement considérée comme un fardeau politique et social, mais comme une exigence pour l'avenir et un atout pour le dynamisme d'un pays.