Etats-unis Au front, à droite

 

L’éditorial de Pascal Coquis

 

En politique, le présent est la seule connaissance qui soit vraiment utile. La mémoire ne pèse rien ou si peu, aux États-Unis encore un peu moins qu’ailleurs, semble-t-il.

 

Pour Mitt Romney, cette dictature de l’immédiat est une bénédiction. Elle lui permet de déplacer radicalement l’axe d’une campagne qui en manquait cruellement et de mettre la barre «à droite toute!» sans craindre de faire chavirer le bateau républicain.

 

À un tout petit peu plus de deux mois de l’échéance, ce changement de cap est audacieux mais à double tranchant. Il peut aussi bien rallier les déçus d’Obama qu’effrayer les électeurs indépendants ou modérés.

 

En attendant, l’extrémisation de son programme dans des proportions encore jamais vues depuis un siècle chez un candidat du «Great Old Party» a relancé une campagne qui patinait dangereusement. L’ancien gouverneur du Massachusetts a cloué le bec à ceux qui le disaient trop mou, trop flou, sans envergure. C’était son premier objectif.

 

Avec l’idole des partisans du Tea Party, Paul Ryan, comme colistier, il a choisi de s’allier la frange la plus dure de son mouvement, celle qui ne reculera devant aucun sacrifice humain pour arriver à ses fins. En même temps, il a posé sur la table la question du choix de la société à laquelle aspirent les Américains. Le 6 novembre, ce n’est pas seulement entre deux hommes que les électeurs devront choisir, mais entre deux programmes et deux visions du monde que tout oppose.

 

Privatisation des assurances santé pour les plus âgés, réduction du rôle de l’Etat à ses basiques fonctions régaliennes, baisse des impôts pour les plus riches, interdiction de l’avortement même en cas d’inceste et de viol: tout cela est annoncé et assumé par le ticket républicain. Et qu’importe que Romney lui-même ait mis en place hier dans son Etat le système d’assurance-maladie qu’il entend démolir demain au niveau fédéral, ou qu’il ait défendu les droits des femmes et des homosexuels. On le sait, ce n’est pas la girouette qui tourne, mais le vent. Et celui du moment vient clairement de la droite.